« Mon cas t’intéresse plus que le tien, c’est ça qui intéresse les gens ! »
A un moment donné de l’apprentissage, je vais entendre: « Non, non, je ne veux pas répéter mon oral, je veux rester spontané.e pour paraître naturel.le ! ». Cela dit en oubliant que, face à l’auditoire, spontanément (parlons plutôt d’une spontanéité longuement acquise de notre éducation) nous sommes plutôt contraint.e et empêché.e par le souci de bien faire et la peur du jugement. Nous perdons ainsi tout naturel, pour ne pas dire consistance quand la mésestime de soi prend le dessus !
Si le naturel est cette propension à être détendu.e, simple, direct.e, pertinent.e et à l’écoute de l’autre … face à un auditoire, ce naturel se travaille ou même se découvre!
Comme le fait un.e comédien.ne, l’orateur.trice apprend à jouer un personnage, à part que pour l’orateur.trice, ce personnage est encore lui.elle même.
Et comme avec un.e comédien.ne, ce qui intéresse l’auditoire ce n’est pas de découvrir quelle personne il ou elle est, avec ses particularités (ses opinions, ses accents particuliers et ses propres affects), mais le personnage qu’il ou elle incarne avec singularité. Pour le dire plus concrètement, ce qui devrait attirer l’attention de votre auditoire n’est pas le fait d'« être à l’aise ou pas » mais plutôt ce que vous avez à lui dire et lui apporter. L’auditoire est là pour obtenir une réponse à une question qu’il se pose, pour être intéressé à un sujet, pour être mobilisé, touché, avoir de la matière à penser …
Tenir son rôle d’orateur.trice peut ainsi émanciper du rôle quotidien (je peux être une personne introvertie dans ma vie et un personnage extraverti sur une scène) et met face à une responsabilité en public : Qui est mon auditoire ? Pourquoi je m'adresse à lui ? Quelle est sa question ? Son intérêt ? Sa préoccupation ? Son attente qui rejoint la mienne? Comment vais je m'adresser à lui pour me faire comprendre ? Faire comprendre mon intention et lui donner envie d'écouter... et sur la durée ? Quel est mon rôle et avec quel style je l'incarne ?
Ce naturel de l’orateur.trice se travaille donc d’après réflexion. Au boulot !
Marjorie Hébrard.
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